L’UGB lance un projet de recherche sur la justice foncière au Sénégal
L’Université Gaston Berger de Saint-Louis a accueilli, ce jeudi 12 juin 2025, l’atelier de lancement du projet de recherche intitulé « Évictions, relocalisations, arrangements fonciers et justice socio-spatiale au Sénégal ». Financé par l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) pour une durée de trois ans, ce programme scientifique s’intéresse aux mécanismes de justice foncière au Sénégal. Coordonné par le professeur Sambou Ndiaye, le projet associe plusieurs institutions partenaires, dont l’UGB, des chercheurs de l’IRD ainsi que l’IPAR. L’objectif est d’analyser ces dynamiques à l’aune de la justice foncière, un concept mobilisé ici pour interroger, sans parti pris, les processus d’éviction et de répartition des ressources.
« Nous sommes parti des multiples phénomènes de dépossession foncière constatés à travers le Sénégal, notamment autour des activités extractives, de l’agrobusiness ou des grands projets d’aménagement », a expliqué le Pr Ndiaye. Le projet explore quatre dimensions complémentaires : la justice distributive (accès équitable aux ressources), la justice procédurale (participation aux décisions), la justice de reconnaissance (droits et statuts) et la justice épistémique (prise en compte des savoirs locaux).
Pour mener cette recherche, dix enseignants-chercheurs et six doctorants sillonneront plusieurs territoires sénégalais. A en croire le Pr Sambou NDIAYE, l’ambition est double : éclairer les politiques publiques et contribuer à la réforme foncière par des recommandations scientifiques co-construites avec les acteurs du terrain. Une démarche résolument
participative est au cœur du projet. « Dès la définition de la problématique, nous avons impliqué les parties prenantes : administration foncière, collectivités locales, ONG, projets de développement, universités », souligne le coordonnateur.
Pour sa part, M. Djiby DIAGNE, conseiller municipal de Gandon et président de la commission des relations extérieures, a souligné l’importance de cette initiative pour les collectivités locales. « Le foncier est une question extrêmement sensible. Chaque jour, des conflits éclatent. Nous avons besoin d’approches proactives basées sur la recherche pour les prévenir », a-t-il déclaré. Il a salué notamment le rôle des universités dans le service à la communauté, une mission désormais centrale des établissements publics d’enseignement supérieur. « Ce projet peut nous fournir des outils concrets pour anticiper les impacts de cette réinstallation sur notre territoire, notamment sur les moyens de subsistance des populations concernées », a affirmé M. Diagne.
Pour le socio-anthropologue Philippe Lavigne-Delville, ce projet « s’inscrit pleinement dans la politique de recherche partenariale de l’IRD », en misant sur une co- construction des problématiques, une collaboration sur le terrain, et un renforcement des capacités scientifiques, notamment des doctorants impliqués. Si la recherche ne prétend pas régler les conflits fonciers, elle peut en revanche « mieux poser les termes du débat », a-t-il déclaré. En analysant les mécanismes d’injustices perçues qu’il s’agisse de pertes territoriales, de relocalisation ou de partage inéquitable des bénéfices, la recherche permet de comprendre les tensions et de favoriser un dialogue éclairé entre les acteurs.
« Notre rôle est d’apporter des éléments de compréhension pour nourrir le débat public. Rendez-vous dans trois ans pour discuter des résultats et de notre contribution aux politiques foncières au Sénégal », conclut-il.
La recherche-action engagée dans le cadre du projet JEAI JF apparaît ainsi comme un levier stratégique pour éclairer les décisions publiques locales, renforcer la cohésion sociale et accompagner durablement le développement territorial.